Le maître était parti sans leur laisser d’adresse. II était à des noces et ce devait être loin. Personne ne connaissait l’heure où il reviendrait. Peut-être serait-il minuit, ou même plus tard encore. II faut se faire une raison : Dieu s’est voulu absent. Inutile de rêver. De prétendre que l’on voit sa présence, son action, le bras de la justice, son geste qui récompense, des preuves dans le ciel, ou dans le merveilleux, ou dans l’inexplicable. II ne parlera pas. II n’interviendra pas. Son soleil luira sur les bons et les méchants. Oui, Dieu est bien parti.
Mais avant qu’il s’en aille, Jésus leur avait dit de l’attendre en gardant leurs lampes allumées. Mais il y aurait ceux et celles qui, bientôt, laisseraient éteindre la lampe,
qui se fatigueraient et qui l’oublieraient. Ceux et celles aussi qui, tout à leur regret de le savoir parti et à leur nostalgie, resteraient à ne rien faire et garderaient les yeux fixés sur l’horizon, pour ne pas le rater quand il les rejoindrait. Puis tous ceux et celles qui, veillant à la lumière, entretenant la flamme, resteraient nuit et jour en tenue de service. La tenue pour l’attendre.
Car ce sont ceux et celles qui se mettent au service des autres, des plus faibles, des plus pauvres, des lépreux, des malades, des blessés de la vie, des enfants exploités et des vieux oubliés, de celles qui ont faim de plus de dignité et de ceux que rejette le monde du travail, et des mendiants qui choquent dans les rues de commerce et de consommation. C’est là qu’ils ont toute chance d’un jour le rencontrer. Lui qui, avec sa croix, signe du serviteur qui est allé jusqu’au bout, frappera à leur porte et leur dira : « C’est moi, me voici revenu. »